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Biographie
Edmond Kirazian naît en Égypte de parents arméniens francophiles : il est prénommé Edmond,
en hommage à Edmond Rostand. À dix ans, il exécute sa
première peinture, visible des deux côtés, car il ignore comment on
apprête une toile. L’œuvre se trouve à présent dans
l’église arménienne de Bagdad,
où chacun peut l’admirer « comme une peinture
miraculeuse1 ».
Edmond étudie au collège des Frères des Écoles
chrétiennes. Il parle arménien, arabe,
français et anglais.
Les débuts
À dix-sept ans, il entame une carrière de dessinateur
politique dans des journaux égyptiens : Image, la
revue des troupes britanniques Parade, le quotidien de
langue française La Réforme d’Alexandrie,
l’hebdomadaire de langue arabe Al Moussavar,
l’hebdomadaire Al Itnein... En 1942, Edmond, qui
produit jusqu’à cinq dessins par jour, découvre avec
enthousiasme le travail de David Low, dessinateur politique du
Daily Mail.
En 1946, il se rend à Paris, muni du mot d’une amie dont
les parents possèdent un hôtel particulier avenue Montaigne2.
La gardienne le laisse choisir entre les trente chambres. Il
choisit la plus belle. Pendant un an, il s’applique à
découvrir un Paris qui, « vu d’Égypte, est encore la
capitale des arts, du goût et de la mode3 ».
Une de ses activités favorites consiste à aller s'asseoir au jardin
du Luxembourg, en compagnie d’un ami, et attribuer une note
sur dix aux jolies Parisiennes qui passent :
« J'ai vu des libellules ! » s’exclame-t-il.
Au bout d'un an, les économies se sont envolées1.
Il retourne en Égypte.
Mais Kiraz est tombé amoureux de Paris et, deux ans plus tard,
il revient s’y installer pour de bon, « avec
l’intention de tout voir, de vivre intensément et surtout de
peindre3 ».
Kiraz est un admirateur de Velasquez, de Vermeer, de Bonnard, ces peintres dont on retrouvera
l'influence dans Les Parisiennes[Par exemple ?].
À Montparnasse (il a son atelier
boulevard Raspail), il côtoie les artistes.
Il fréquente l’Académie de la Grande
Chaumière, où il étudie le nu.
Avenue Montaigne, il a remarqué la rédaction du journal La
Bataille. Il y collabore de 1949 à 1951. Il dessine ensuite
dans Le Rouge et le Noir (1951-1952). C’est le
20 janvier 1951, dans le numéro 290 de Samedi
Soir, qu’apparaît Line, sa première figure féminine. Et
c’est le 6 août 1953, toujours dans Samedi
Soir, qu’il commence un « Carnet de belles ».
Il collabore à ce journal jusqu’en décembre 1955. Mais il
abandonne peu à peu le dessin politique, et poursuit sa rubrique
« Carnets de belles » dans Ici Paris, de 1955 à 1964.
Jours de France
En 1959, Marcel Dassault remarque les dessins de
Kiraz dans Ici Paris. Il lui demande d’assurer deux
pages de dessins d’humour dans son hebdomadaire, Jours de France. Marcel Dassault propose
d’intituler ces deux pages « Les Parisiennes ».
Kiraz trouve le titre affligeant, mais il accepte.
Jours de France voit apparaître les créatures
sophistiquées de Kiraz — chaque semaine dans un décor
nouveau : Parisiennes au bureau, Parisiennes au volant,
Parisiennes en vacances… Ces nunuches filiformes, aux jambes
démesurées, commencent par déconcerter. Puis elles séduisent.
Écervelées, acidulées, pimpantes, sexy, elles proposent « une
vision de la futilité française que seul un œil étranger
pouvait capter4 ».
« Tout en ces filles élancées semblait défier la
pesanteur », relève le peintre et essayiste Ange-Henri
Pieraggi. Les yeux en amande, les lignes fluides, un trait stylisé
de beaucoup de classe, les reflets de la mode, l’univers des
beaux quartiers, le détail fashion, une aisance à
interpréter l'air du temps, un humour très personnel imposent Kiraz
comme un dessinateur complètement hors normes, et lui valent un
grand succès. « Indépendantes, se souvient Carla Bruni, frivoles, infidèles mais
traditionnelles, naïves mais aussi malignes, calculatrices mais
spontanées, c’étaient les Parisiennes [...] Les Parisiennes
sont les Parisiennes, légères et intemporelles, et je souhaite bien
du courage à leurs futurs maris5. »
Le 26 décembre 1964, dans le numéro 528, apparaît sur toute
une page, en plus des deux pages noir et blanc, un grand dessin
couleur : le premier « Kiraz-color ». « Cette
page phare était le rendez-vous hebdomadaire de nombreux
lecteurs », rappelle Olivier Dassault. Un Kiraz-color
n’est pas un dessin « mis en couleur », mais une
exigeante composition tonale où Kiraz, qui semble ne travailler que
par plaisir, peut s’adonner à sa passion première de la
peinture. La légende humoristique vient souvent en dernier, vers
seize heures moins cinq, lorsque l’artiste
« paniqué » reconnaît dans l’escalier le pas du
coursier de Jours de France6.
« Kiraz captait, dit Christian Lacroix, semaine après semaine,
l'essence de la mode, d'une manière qui était celle d'un
couturier. » Et le fait est que l’élégance des
Parisiennes va inspirer plus d’un créateur. Le style
de grands couturiers, celui de pionniers du prêt-à-porter (le
New Look de Dior, Chanel,
Courrèges, Cardin, Lacroix, Scherrer) trouvent une nouvelle impulsion
dans les dessins de Kiraz1.
Modestement, Kiraz prétend s'inspirer lui-même de silhouettes
aperçues dans la rue, de ces terrasses de café où il aime
s’installer pour écouter et observer3 :
« Les Parisiennes seules
m’apportent un spectacle complet, une source d’énergie.
Elle courent, elles bougent... Après quoi courent-elles ?
[...] À Paris seulement je trouve cette énergie et cette clarté, ou
cette apparence de clarté. Parce que, bien sûr, je n’en sais
pas plus... Je m’arrête avant d’en connaître
davantage7. »
De 1959 à 1987, Kiraz publie dans Jours de France près
de 25 000 dessins8
(jamais un dessin n’a été refusé3).
Quelques mois après la mort de Marcel Dassault, il arrête sa
collaboration à Jours de France (no 1672,
du 31 janvier 1987). L’hebdomadaire cesse de paraître,
deux ans plus tard.
L’après Jours de
France
Si le nom de Kiraz reste associé à l’histoire de Jours
de France, le dessinateur collabore aussi à Gala (de 1995 à 2000), à Paris Match, à Vogue,
à Glamour (septembre à
décembre 1995), à ABC hebdomadaire (Espagne), à Ola
(Espagne), à Grazia (Italie), et aussi à Playboy (dès 1970) où le dessin se fait plus
coquin.
Ses Parisiennes sont également très demandées en
publicité9 :
Perrier (à partir de 1962),
Scandale (1968-1969), Candia (début des années 1970), Loto, les
stylos Parker (1978), Clio Chipie de
Renault (1995), Canderel10
(1995 à 2003), Gaston De Lagrange, Monoprix, Nivea
(1997), boutique Serendipity (à Sony Plaza, au Japon, en
2004)…
Bibliographie
Recueils
- Lissy, Diogènes, 1954
- Carnet de belles, Pulcinella, 1959
- Les Parisiennes, Denoël, 1963
- Les Parisiennes au volant, Denoël, 1966
- La Parfaite Secrétaire11,
Denoël, 1967
- Parlez-moi de moi : les Parisiennes, Denoël,
1973
- Sonate à quatre mains, Filipacchi-Denoël, 1978
- Les Femmes de Kiraz, Plon, 1985
- Les Parisiennes se marient, Assouline, 1994
- Je les aime comme ça, Denoël, 2000
- Kiraz,
Jamais le premier soir, Éditions Denoël, octobre 2001,
127 p. (ISBN 978-2207252567, présentation en ligne)
- Kiraz,
Kiraz dans Playboy, Éditions Denoël, octobre 2002,
107 p. (ISBN 978-2207254035, présentation en ligne)
- Kiraz,
Elles et moi, Éditions Denoël, octobre 2003,
128 p. (ISBN 978-2207255469, présentation en ligne)
- Kiraz,
Mini drames, Éditions Denoël, octobre 2005,
118 p. (ISBN 978-2207257494, présentation en ligne)
Catalogue d'exposition
Notes et références
- ↑
a,
b et
c Anne de Kinkelin, Kiraz fête les
Parisiennes [archive].
- ↑
La précision a son importance, quand
on connaît l’univers « mode » et bourgeois des
Parisiennes : sur la très chic avenue Montaigne
s'alignent les boutiques de prestigieux couturiers. Le destin de
Kiraz sera marqué par l’avenue Montaigne, puisque c’est
là qu’il découvrira la rédaction de La Bataille et
que c’est à l’angle de cette avenue et des Champs-Élysées que trône le
siège de Jours de France.
- ↑
a,
b,
c et
d Notice
biographique, rabat de jaquette de Je les aime comme
ça.
- ↑
Catherine Schwaab, en 1995. Cité par
Solo, Plus de 5 000 dessinateurs de presse &
600 supports : en France de Daumier à l’an
2000, Solo - Saint-Martin, et Aedis, 2004.
- ↑
Carla Bruni, préface de Les
Parisiennes se marient.
- ↑
Exposition Kiraz du musée Carnavalet,
2008 [archive]
- ↑
Rabat de jaquette, Jamais le
premier soir.
- ↑
Notice biographique, rabat de jaquette
de Je les aime comme ça. Le chiffre paraît élevé :
l’éditeur a peut-être confondu avec une période plus large de
la carrière de Kiraz. À raison de six dessins hebdomadaires, puis
sept, on peut estimer la production de Kiraz pour Jours de
France à quelque 10 000 dessins.
- ↑
« Les campagnes publicitaires
utilisant les parisiennes sont innombrables : de
« Perrier » à « Canderel » en passant par le
« Loto », « Parker », « Renault »,
« Scandale », « Gaston De Lagrange »,
« Monoprix » « Nivea » et dernièrement pour la
marque « Serendipity » à Sony Plaza au Japon. » in
BIOGRAPHIE
KIRAZ. [archive]
-
↑ Dessins réunis dans
Canderel : le livre, Canderel, 1999.
-
↑ Traduit en italien
(La segretaria perfetta, Giorgio Borletti Editore, 1970)
et en allemand (Die perfekte Sekretärin, Bärmeier &
Nikel, 1970).
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes